WordPress de A à Z — G comme GPL (Licence Publique Générale)

Dans la série WordPress de A à Z, je ne pouvais faire l’impasse sur les conditions d’utilisation, de copie et de redistribution dont notre CMS fait l’objet via la licence publique générale GNU. Malgré des compétences juridiques limitées, il m’a semblé important de consacrer un article sur cette question qui est finalement au coeur de l’écosystème qui s’est mis en place depuis la création de b2 en 2001 par Michel Valdrighi jusqu’à la version que nous connaissons aujourd’hui. Le document WordPress Copyright retrace les évolutions et changements qui ont affecté le droit d’auteur et la licence de WordPress. Voici le sommaire complet des 26 articles de WordPress de A à Z.

Je n’aborde pas la question des licences appliquées aux contenus, mais à WordPress en tant que CMS. Si le sujet du droit d’auteur vous intéresse, n’hésitez pas à lire l’article Non, le droit d’auteur français n’est pas ringard ! et les nombreux commentaires instructifs dont il a fait l’objet.

WordPress carbure au GPL

Si WordPress était un pays, sa Constitution serait probablement la licence GPL car elle protège ses libertés fondamentales et celles de ses utilisateurs. L’équipe de WordPress fait de son mieux pour que WordPress.org reste «propre» en faisant la promotion de produits (thèmes, plugins) entièrement compatibles avec la licence GPLv2 qui régit actuellement WordPress. Les objectifs sont multiples : ne pas mettre l’utilisateur dans l’embarras avec des restrictions ; permettre une large diffusion des travaux dérivés et partager du code le plus librement possible.

Plus précisément, cette licence libre garantit :

  1. La liberté d’utiliser WordPress ;
  2. La liberté d’étudier le fonctionnement du CMS et de l’adapter à ses besoins ;
  3. La liberté de redistribuer des copies ;
  4. La liberté de faire bénéficier à la communauté des versions modifiées.

La popularité de WordPress a entraîné une multiplication des offres de services autour du CMS et la question du statut des thèmes et des plugins impliqués s’est rapidement posée : sont-ils de facto soumis à cette même licence GPL ?

D’après l’organisation Software Freedom Law Center qui a passé du temps à décortiquer le code source de WordPress, le code PHP qui «propulse» les thèmes WordPress doit être sous licence GPL. Toutefois, ce n’est pas forcément le cas des images et des feuilles de styles CSS : elles peuvent être incluses dans la GPL, sans que cela soit une obligation(1). Pour illustrer cette question, je vous invite à lire l’excellent billet de Xavier Borderie WordPress, Thesis, et la licence GPL qui expose pratiquement tout ce qu’il faut savoir sur les relations entre les thèmes, les plugins et la licence GPL.

Généralités

La licence GPL existe en plusieurs versions ; WordPress est soumis à la version 2 ou ultérieure (cf. wordpress.org/about/gpl) :

The GPLv2 (or later) from the Free Software Foundation is the license that the WordPress software is under. Its text follows.

Il est existe des versions françaises non officielles de cette licence (toutefois, seule la version anglaise fait foi) :

Par ailleurs, cette Foire aux questions sur les licences GNU apporte des éclaircissements bienvenus.

Deux ou trois choses à retenir

Les licences libres sont parfois complexes à comprendre : droits d’auteur, possibilité de modifier le code source, facturation du travail effectué sur une base reposant sur du code sous licence GPL, etc. Les questions sont nombreuses. Voici trois mises au points parmi celles qui me semblent les plus importantes :

1. Copyright vs. Copyleft ?

Comme toutes les licences inspirées par la notion de copyleft, la GPL s’attache aux droits des utilisateurs, tandis que la notion de copyright s’occupe du droits des auteurs. Contrairement aux apparences, le copyleft se s’oppose pas au copyright. On peut même dire que le second garantit le premier, dans le sens où si on distribue des copies du travail sans respecter les termes de la GPL (en gardant le code source secret par exemple), on peut être poursuivi par l’auteur original en vertu du copyright.

D’ailleurs, si l’on regarde de près le préambule du fichier licence.txt fournit avec WordPress, on peut lire :

This program incorporates work covered by the following copyright and permission notices:
b2 is (c) 2001, 2002 Michel Valdrighi - m@tidakada.com - http://tidakada.com

Wherever third party code has been used, credit has been given in the code's comments.

b2 is released under the GPL

and

WordPress - Web publishing software

Copyright 2003-2010 by the contributors

WordPress is released under the GPL

La propriété intellectuelle du code de WordPress appartient à Michel Valdrighi pour la période 2001 — 2002 et aux contributeurs de WordPress pour la période suivante. Ce qui n’empêche pas — comme vous le voyez — que l’ensemble soit soumis à une licence libre, comme la GPL.

2. Gratuit vs. payant ?

La notion de liberté se confond souvent avec celle de gratuité. Or, la GPL n’impose pas que les logiciels sous GPL soient gratuits. C’est même presque le contraire : la GPL indique explicitement qu’un travail sous GPL peut-être (re)vendu. En cas de modification, le résultat doit être placé sous la même licence.

Il est donc tout a fait possible de redistribuer, gratuitement ou non, un thème que l’on a acheté (2). C’était d’ailleurs le sujet de l’article WordPress: le GPL a-t-il atteint ses limites ? écrit par Francis Chouquet en 2009.

3. Obligation de redistribuer ?

L’obligation de remettre le logiciel sous GPL après modification ne s’applique que pour les travaux qui ont vocation à être distribués publiquement. Si vous utilisez un thème WordPress dans le cadre d’un contrat privé, votre client ne se sera pas obligé de publier le code source s’il ne souhaite pas redistribuer publiquement ce qu’il a acheté.

Le copyleft s’applique uniquement quand une personne veut redistribuer le programme. On est autorisé à faire des versions modifiées privées, sans aucune obligation de divulguer les modifications effectuées sur le programme s’il n’est distribué à personne. Le copyleft s’applique uniquement au programme et non à ses sorties. Par exemple, un portail Web utilisant une version modifiée privée d’un CMS sous GPL ne sera pas obligé de livrer ses sources. — Wikipedia

En effet, il est tout à fait possible de modifier un thème et de l’utiliser à titre privé sans mettre les sources à la disposition du public y compris dans le cadre d’une organisation (association, société). Comme le précise la FAQ citée plus haut : une organisation peut réaliser une version modifiée et l’utiliser en interne sans jamais la diffuser en dehors de l’organisation.

Par ailleurs, il n’est pas possible d’obliger quelqu’un à vous donner ou vous vendre la version modifiée d’un programme sous GPL. Si cette licence permet de faire des copies et de redistribuer un thème WordPress, par exemple, elle n’oblige personne à le faire. Chacun a le droit de garder son travail pour lui, s’il le souhaite.

Conclusion

J’espère que cet article permettra au plus grand nombre d’en savoir un peu plus sur l’intérêt et les limites de cette licence dans le cadre de l’utilisation de WordPress.  et plus précisément sur le fait de savoir s’il est possible :

  1. De conserver la propriété intellectuelle de son travail ;
  2. De vendre des prestations autour du logiciel libre en général et de WordPress en particulier ;
  3. De ne pas redistribuer les modifications que l’on serait amené à faire pour son propre compte ou celui d’un client dans le cadre d’un contrat privé.

Plus que jamais, n’hésitez pas à rectifier les approximations ou les erreurs qui auraient eu le mauvais goût de se glisser dans cet article.

Remerciements

(1) Merci à Jean-René Le Guillou (@leguillouxjr) d’avoir insisté sur ce point lors de sa participation à la relecture du premier jet de cet article.

(2) Merci également à Marie Faubert (@MarieFaubert) pour avoir soulevé cette question souvent oubliée.

Ressources