Le prêt-à-bloguer bride-t-il la créativité ?

Comme toutes les disciplines graphiques, la conception de modèle de site internet (Webdesign) est traversée par les modes et les tendances. Parmi elles, le design minimaliste (style épuré, typographie fine, utilisation parcimonieuse des visuels, grille de mise en page tirée au cordeau) est sans doute le plus répandu. C’est certainement celui qui est amené à perdurer en raison de son faible potentiel de lassitude. Toutefois, il ne faut pas confondre ce style épuré avec le style «sans style». Sorte de design pauvre mis au service d’un contenu pré-mâché où le contenant n’a d’intérêt que s’il permet à Google d’avaler les contenus sans avoir le hoquet.

Force est de constater que le fait d’avoir mis l’installation des blogs à la portée de tous, allié à la propension des individus au moindre effort ainsi qu’à leur tendance à la reproduction des comportements, abouti à une double uniformisation des contenus et des contenants.

Des contenus dupliqués à l’extrême

Si on enlevait les blogs des spécialistes SEO autoproclamés, des Community Manager en devenir ou des chantres des réseaux sociaux et du High-Tech s’extasiant sur le moindre déplacement d’un bouton de connexion, la circulation sur les autoroutes de l’information serait plus fluide. Savez-vous qu’un seul blog peut en remplacer un bon millier ? Goopilation, par exemple, propose la traduction des actualités publiées sur les blogs de Google. On retrouve plus ou moins la même chose pour Twitter avec la version française du blog de Twitter.

Il suffirait de traduire ainsi une grosse dizaine de blogs anglo-saxons issus du web 2.0 pour mettre au chômage 90% des blogs francophones soi-disant High-Tech. Les 10% restants sont les blogueurs qui apportent une valeur ajoutée grâce à leur vision sur le long terme et leur compréhension des enjeux socio-économiques sous-jacents.

Ergonomie ou marketing ?

Beaucoup pensent que l’ergonomie est aux blogs ce que l’aérodynamisme est à l’automobile : un moyen permettant d’aller plus vite en essayant de ne pas gaspiller trop de ressources. Cela semble séduisant, mais à l’époque des débuts de l’aventure automobile, la forme des véhicules n’avait que l’imagination des créateurs comme limite… Les blogs vont-ils tous se ressembler pour offrir le moins de résistance au clic sponsorisé et s’adapter au plus petit dénominateur commun ?

Voilà en substance ce que j’écrivais en mars 2007 dans Ergonomie des blogs : utilisabilité ou marketing ? Je pensais à l’époque que la monétisation des blogs allait tuer la blogosphère mais il semble que la course au SEO et aux classements s’en soit chargés avant…

L’absence de design, ce n’est pas du minimalisme

Dis, c’est quoi le design ? En anglais, une des acceptions du terme «design» est «dessein», comme dans The Great Design. Je n’irais pas jusqu’à dire que si l’on enlève une lettre à «dessein» on obtient «dessin», mais presque !

Le minimaliste c’est du design où les fioritures graphiques auraient laissé la place à du blanc distribué avec générosité et à bon escient. Mais attention : tous les sites web ne gagnent pas à être ultra minimalistes ! Une fois qu’il n’y a plus rien à retrancher dans le design d’un site internet, il peut être judicieux d’ajouter des éléments graphiques pour flatter l’oeil et valoriser le contenu.

Trouver son chemin

Sur la durée, l’intérêt d’un blog réside en grande partie sur l’originalité du contenu (style, angle de vue, diversité des sujets abordés par l’auteur) que le contenant devrait refléter. Le design est une vitrine pour les contenus. Pour que les lecteurs s’arrêtent, il est important de personnaliser son blog quand bien même on n’aurait pas de véritable patte graphique. L’important est que le ramage se rapporte au plumage.

Ecrit à quatre mains avec Jiann Venturini @_jiann sur Twitter — étudiant en Master Webdesign à Sup de Pub Paris.