Une très brève histoire des métiers du web et de la PAO (publication assistée par ordinateur)

Lorsque j’ai publié mon dernier billet sur le design dans le navigateur avec HTML5 et CSS3, je m’attendais à des commentaires sur mon interprétation du rôle et de l’utilisation des nouvelles balises HTML5 pour structurer les contenus telles que `header`, `hgroup`, `section`, `aside`, `nav`, `article` ou `footer`. A la place, j’ai vu apparaitre une discussion plutôt orientée « graphistes vs. intégrateurs » web au sens large, qui m’a donné envie de faire un retour en arrière sur mon expérience des métiers de la chaine graphique et des métiers du web.

Attention : un peu d’humour et de second degré se sont glissé dans ce billet, merci pour votre compréhension 😉

Mon parcours professionnel m’a amené à côtoyer et à exercer plusieurs métiers de la chaine graphique : exé PAO, infographiste, scannériste-retoucheur, chef de studio, flasheur et j’en oublie certainement. Côté web, j’ai commencé à « faire » des sites web à une époque où le métier de webmaster était plutôt bien vu. Je suis devenu intégrateur web, puis webdesigner en attendant de faire mon chef de projet là où l’on voudra bien de moi 😉

En 1990, lorsque j’ai commencé à me former en PAO, la plupart des professionnels ont vu d’un mauvais oeil l’arrivée de l’informatique dans leurs métiers.

Jusqu’en 1993, j’ai eu l’occasion de travailler avec des Directeurs artistiques qui dessinaient leur maquettes, collaient les photos et titraient avec des lettrasets. Le travail de l’exé PAO consistait à rendre cette maquette fonctionnelle à l’aide des logiciels Quark XPress, Photoshop ou Illustrator. Il fallait également assurer la préparation pour l’impression : formats d’images, colorimétrie, débords, défonce, etc. Toutes ces choses un peu techniques que le DA ignorait le plus souvent et que l’on regroupait sous le vocable « pré-pressse ».

Quelques années plus tard (1997), la majorité des DA travaillaient directement dans Photoshop ou Illustrator mais les questions techniques autour du pré-presse n’étaient toujours pas digérées.

A partir des années 2000 les exés sont devenus (ou ont été remplacés par) des infographistes. Il fallait non seulement savoir faire l’exé et assurer la partie pré-presse, mais être également capable d’intervenir sur la partie création en adaptant la charte graphique mise en place dans les grandes lignes par le DA.

De nombreux infographistes ont peu à peu goûté à la créa et ont été à même — non pas de proposer des pistes graphiques, qui restait globalement le coeur de métier des DA — mais de travailler directement dans XPress ou InDesign pour « faire » une affiche, mettre en page un magazine ou proposer un logo. Le rôle du DA (quand il y en avait un) était plutôt axé relation-client (boire un coup avec les donneurs d’ordre) et benchmarking (lecture de la presse spécialisée devant la machine à café) ^__^v

Cette brève histoire de la PAO montre bien qu’il y a eu factorisation des métiers de la chaine graphique. Bien sûr le simple exé existe toujours, mais pour être embauché il doit en savoir bien plus qu’aux débuts héroïques.

Il se passe la même histoire avec les métiers du web.  Au début, le métier de webmaster consistait grosso modo à intégrer les contenus envoyés par les clients (les back-office coûtaient cher et les CMS n’existaient pas encore), à ajouter de nouvelles pages, à maintenir et optimiser le site pour continuer à satisfaire les visiteurs toujours plus nombreux.

Une partie des webmasters se sont spécialisés dans les langages HTML, CSS et Javascript et son devenus des intégrateurs web ou des développeurs front-end. Ceux qui avaient une sensibilité artistique sont devenus des webdesigners.

Parallèlement à cela, une grande partie des graphistes traditionnels ont de plus en plus travaillé pour le web en fournissant des fichiers .psd à découper. Certains ont finit par ne faire que du webdesign et sont de fait devenus des… webdesigners sans toutefois posséder la culture technique des anciens webmasters. Comme les DA évoqués plus haut qui ignoraient tout ou presque des contraintes pré-presse.

Vous me voyez venir : la factorisation qui a eu lieu dans les métiers de la chaine graphique n’a aucune raison d’être épargnée aux métiers du web. Elle est même plus féroce dans la mesure où l’intégrateur HTML et CSS doit de plus en plus devenir un développeur web front-end en ajoutant Javascript à son arc. Voire même maitriser un langage côté serveur comme PHP ou faire de l’administration serveur en jonglant avec plusieurs kernels à la fois ! Parti de webmaster, le travailleur du web tend à redevenir un homme ou une femme à tout faire.

Quant aux webdesigners « graphistes », une partie d’entre eux semble regretter le temps où le format A4 était roi et n’obligeait pas le lecteur à faire défiler la page 😉 Tiens, ça me rappelle Deux mots sur le graphisme, le design et l’ergonomie des sites web que j’ai écris il n’y a pas si longtemps.